En tant que Business Analyst (BA), vous êtes au cœur des transformations organisationnelles et stratégiques. Votre mission principale : garantir que chaque projet repose sur des fondations solides et répond à des objectifs clairs et pertinents. L’étape de définition du problème ou de l’opportunité constitue une pierre angulaire pour assurer le succès d’un projet. Pourtant, elle est souvent négligée, avec des conséquences parfois dramatiques : solutions inadéquates, échec du projet, dépassements de budgets.
Dans cet article, je vous propose d’explorer une méthodologie détaillée pour analyser et formuler avec précision un problème ou une opportunité, en utilisant les bonnes pratiques de la Business Analyse. En suivant chaque étape de ce processus, vous sécurisez la réussite de vos projets et créez une valeur ajoutée durable pour vos parties prenantes.
Pourquoi bien définir un problème ou une opportunité est essentiel
Une définition claire d’un problème ou d’une opportunité constitue le socle de toutes les décisions stratégiques d’un projet. Elle impacte directement l’efficacité de chaque étape ultérieure : analyse des besoins, conception des solutions, développement, mise en œuvre et évaluation des résultats. Voici pourquoi :
- Prévention des erreurs de conception : Un problème mal identifié conduit à des solutions inadéquates qui ne résolvent pas les vrais besoins.
- Optimisation des ressources : Une mauvaise définition entraîne souvent des dépassements de budgets et des retards.
- Sécurisation de l’adhésion des parties prenantes : Une opportunité clairement formulée motive les parties prenantes à s’impliquer activement.
Chiffre marquant : Selon une étude du Standish Group (Source : Standish Group Chaos Report), 70 % des projets technologiques échouent à cause d’une mauvaise définition des besoins initiaux.
Partie 1 : Comprendre le contexte et les besoins des parties prenantes
1.1 Identifier les parties prenantes clés
La première étape consiste à cartographier les parties prenantes impactées par le problème ou l’opportunité. Ces parties prenantes incluent :
- En interne : employés, managers, équipes techniques, direction générale.
- En externe : clients, fournisseurs, partenaires, régulateurs.
Pourquoi c’est important ? Une omission dans l’identification des parties prenantes peut vous faire passer à côté d’informations cruciales, et provoquer des conflits ou une adoption limitée de la solution. Je ne le répéterai jamais assez: le savoir, c’est le pouvoir. Omettez des parties prenantes, et vous touchez du doigt de manière non intentionnelle les égos des oubliés, et contribuez ainsi à l’échec de votre projet de transformation.
Outils pratiques :
- Registre des parties prenantes : Créez un tableau listant les acteurs clés, leurs attentes et leur niveau d’influence.
- Diagramme « power/influence » : Priorisez les parties prenantes en fonction de leur pouvoir de décision.
Exemple : Dans un projet de mise à jour d’un ERP, les parties prenantes incluent l’équipe comptable (utilisateurs finaux), l’équipe IT (support technique) et les décideurs financiers.
1.2 Recueillir les besoins et frustrations
La collecte des besoins est cruciale pour comprendre les causes profondes d’un problème ou les avantages potentiels d’une opportunité. En business analyse, on parle plutôt d’élicitation : le recueil d’une information exhaustive, fiable, vérifiée et consensuelle. Mais par souci de vulgarisation dans cet article, je parlerai de recueil / collecte des besoins.
Les techniques et méthodes incluent :
- Interviews individuelles : Obtenez des perspectives personnelles des parties prenantes.
- Focus groups : Favorisez des discussions collectives pour identifier des besoins partagés.
- Observations sur le terrain : Analysez les processus en action pour repérer des inefficacités.
- … et bien d’autres (des centaines d’autres), dont il s’agit de maîtriser les avantages et inconvénients, ainsi que les bonnes pratiques d’application pour les utiliser et les combiner de manière efficace.
Astuce : Documentez chaque frustration exprimée et recherchez des causes communes.
Exemple : Une entreprise constate que les demandes clients mettent trop de temps à être traitées. Les observations révèlent que les processus manuels sont inefficaces et sources d’erreurs.
1.3 Formaliser le contexte
Formaliser le contexte aide les parties prenantes à partager une vision commune. Cela inclut :
- SWOT : Identifiez les forces, faiblesses, opportunités et menaces dans l’écosystème.
- Cartographie des processus : Visualisez les flux d’activités pour repérer des points de blocage.
- Diagramme de contexte : Décrivez les interactions entre systèmes et acteurs.
Avantage : Un contexte clair évite les malentendus et les interprétations divergentes.
Partie 2 : Formuler le problème ou l’opportunité avec précision
Maintenant que vous comprenez bien le contexte et les besoins des parties prenantes, il s’agit de formuler le problème ou l’opportunité avec précision. Comment faire? Je vous l’explique pas à pas.
2.1 Différencier problème et opportunité
- Problème : Une contrainte ou un écart entre l’état actuel et l’état désiré.
- Opportunité : Une possibilité d’amélioration ou d’innovation.
Exemples :
- Problème : « Les rapports financiers prennent 5 jours à produire, ce qui retarde la planification budgétaire. »
- Opportunité : « Adopter un ERP pour réduire de 30 % le temps de traitement des données. »
2.2 Identifier les causes racines
Les méthodes d’analyse des causes incluent :
- 5 Pourquoi : Interrogez successivement « Pourquoi ? » pour remonter à la cause initiale.
- Diagramme d’Ishikawa : Catégorisez les causes par facteurs (personnel, processus, outils, etc.).
Exemple : Un taux d’erreur élevé dans les commandes clients pourrait résulter d’une formation inadéquate, et non uniquement d’un logiciel obsolète.
2.3 Formuler en termes SMART
Une bonne formulation est :
- Spécifique : Le problème ou l’opportunité est clairement identifié.
- Mesurable : Appuyez-vous sur des indicateurs.
- Atteignable : L’objectif est réaliste.
- Réaliste : Les ressources et contraintes sont prises en compte.
- Temporel : Fixez une échéance.
Exemple SMART : « Le taux d’erreur des bons de commande doit passer de 8 % à 2 % en 6 mois grâce à une automatisation. »
Partie 3 : Valider et prioriser le problème ou l’opportunité
Ne pensez pas que le processus s’arrête là. En effet, même si vous avez mené des dizaines d’ateliers avec vos parties prenantes et que celles-ci ont l’air d’être d’accord, de nombreux facteurs rationnels et biais cognitifs remettent souvent en jeu les résultats. Valider et prioriser est la suite logique et incontournable pour ne pas conclure trop rapidement et mettre en péril la suite du projet.
3.1 Validation collaborative
Impliquez les parties prenantes pour valider la formulation.
Comment ?
- Organisez des ateliers collaboratifs.
- Utilisez des outils comme Miro pour visualiser les points clés.
Bénéfice : Une validation collective évite les résistances futures.
3.2 Évaluer l’impact et la faisabilité
Pour prioriser correctement un problème ou une opportunité, évaluez son impact potentiel et sa faisabilité.
Critères d’impact :
- Amélioration de la satisfaction client.
- Augmentation des revenus ou réduction des coûts.
- Réduction des risques opérationnels ou de conformité.
Critères de faisabilité :
- Ressources disponibles (budget, compétences, technologies).
- Contraintes temporelles.
- Risques associés à la mise en œuvre.
Méthodes d’analyse :
- Matrice Impact/Faisabilité : Positionnez chaque problématique ou opportunité sur une matrice pour guider vos priorités.
- Analyse coût-bénéfice : Comparez les investissements requis avec les bénéfices attendus.
Exemple : Si une amélioration des processus de traitement client promet une réduction de 40 % du temps de traitement, mais nécessite un budget important pour un nouveau logiciel, cela devra être pondéré avec les priorités stratégiques de l’entreprise.
Partie 4 : Communiquer efficacement le problème ou l’opportunité
Une fois le problème ou l’opportunité identifié et validé, il est essentiel de bien le communiquer aux parties prenantes. Cela garantit un alignement stratégique et opérationnel.
4.1 Créer un document de synthèse
Un document clair et structuré aide à convaincre les décideurs et aligne les équipes. Voici les éléments à inclure :
- Contexte général : Description du cadre actuel.
- Problème ou opportunité identifié(e) : Formulation SMART.
- Causes racines : Résultats des analyses (Comme vu précédemment : 5 Pourquoi, Ishikawa, etc.).
- Impact attendu : Résultats mesurables si une solution est mise en place.
- Recommandations : Propositions initiales pour avancer.
Outils utiles :
- Modèle d’étude d’opportunité. Note: cet outil est parfois appelé “Business Case”, même si cette expression est un amalgame avec le document financier qui, lui, permet de calculer le ROI et est en général présenté sous forme de tableur.
- Présentation PowerPoint synthétisant les conclusions principales.
4.2 Adapter la communication selon l’audience
J’évoque régulièrement l’importance cruciale de savoir communiquer quand on est un professionnel en Business Analyse.
Communiquer, ce n’est pas “juste” savoir bien s’exprimer en public.
Communiquer, c’est la capacité de transmettre un message clair, quel que soit le format de ce message. Ainsi, pour communiquer efficacement le problème ou l’opportunité, il est important d’adapter votre langage / attitude et votre contenu à vos interlocuteurs.
- Pour les équipes techniques, focalisez-vous sur les aspects opérationnels et les processus.
- Pour les décideurs stratégiques, mettez par exemple en avant les impacts financiers et les risques.
Astuce : Utilisez des visuels (graphes, diagrammes) pour simplifier les concepts complexes.
4.3 Obtenir l’engagement des parties prenantes
Pour sécuriser l’engagement de vos parties prenantes, un envoi par mail de votre PowerPoint est insuffisant. Nous sommes tous submergés de mails et autres demandes, et votre document ne sera pas forcément parcouru avec attention. Toutes les réunions ne sont heureusement pas inutiles, et celle-ci est très importante pour la suite de votre projet.
Organisez donc une réunion ou un atelier pour présenter le problème ou l’opportunité. Encouragez les retours et impliquez les participants dans l’élaboration des prochaines étapes.
Outils recommandés :
- Outils collaboratifs comme Miro ou Trello pour capturer les idées en temps réel.
- Techniques de storytelling pour rendre votre présentation engageante.
Partie 5 : Étapes suivantes après la définition
Une fois le problème ou l’opportunité clairement défini, les prochaines étapes consistent à :
- Identifier et prioriser les besoins métiers : Traduisez le problème ou l’opportunité en besoins métiers plus détaillés.
- Proposer des solutions potentielles : Explorez plusieurs options pour répondre aux besoins identifiés.
- Planifier la mise en œuvre : Développez un plan d’action réaliste avec un calendrier précis pour les 6 prochains mois – au-delà, une road map avec des jalons macros est largement suffisante car il est impossible de planifier à long terme de manière précise.
Conseil pratique : Documentez toutes les décisions et justifications pour faciliter le suivi du projet.
A retenir
Définir un problème ou une opportunité avec précision est une compétence essentielle pour un Business Analyst. Cette étape garantit que les projets sont alignés sur les besoins réels et les priorités stratégiques de l’organisation. Grâce à une méthodologie rigoureuse, vous pouvez non seulement réduire les risques d’échec mais aussi maximiser la valeur ajoutée de vos initiatives.
En suivant les étapes détaillées dans cet article, vous serez mieux armé pour convaincre vos parties prenantes, identifier des solutions adaptées et garantir le succès de vos projets. N’oubliez pas : une analyse approfondie au départ pave la voie à des résultats mesurables et durables.