Ateliers de travail : méfiez-vous du biais de conformisme !

Avez-vous déjà été confronté à des conclusions d’ateliers de travail dont la pertinence a, par la suite, été dénoncée par ceux-là mêmes qui les avaient produits puis validés en séance ? Vous avez peut-être été la victime à votre insu du biais de conformisme – ignorance aux lourdes conséquences sur vous et votre projet.

Le biais de conformisme est un phénomène psychologique qui se produit lorsque les individus modifient leur comportement ou leurs opinions pour se conformer aux normes sociales, aux attentes du groupe ou aux opinions majoritaires, même si cela contredit leurs croyances ou leurs préférences personnelles.

Ce biais peut se manifester dans divers contextes, que ce soit dans des groupes sociaux, des environnements professionnels, des cercles d’amis ou des interactions en ligne. Les personnes peuvent ressentir une pression sociale pour se conformer aux opinions ou aux comportements qui sont considérés comme dominants ou acceptables dans leur environnement.

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Biais de conformisme : l’expérience étonnante de Solomon Asch

L’une des expériences les plus connues qui illustre ce biais cognitif est l’expérience de Asch. Solomon Asch (1907-1996) est l’un des pionniers de la psychologie sociale, il est notamment connu pour avoir reproduit en 1960 une autre expérience stupéfiante, celle de Milgram. Cette dernière démontrait que les personnes sous pression pouvaient faire des choses effrayantes – comme torturer leurs semblables. L’expérience de Asch rejoint dans une certaine mesure celle de Milgram car dans les deux cas, le sujet se dédouane de la responsabilité de ses actions et de ses actes sur un facteur extérieur.

Ainsi, l’expérience de Asch visait à étudier le degré auquel les individus se conforment à la pression sociale pour adhérer à une opinion majoritaire, même si celle-ci est incorrecte.

Et en tant que Business Analyst, vous allez voir que le biais de conformisme ainsi mis en lumière peut réellement fausser les résultats dans vos ateliers de travail !

Pour mieux comprendre ce biais cognitif, reprenons en synthèse le déroulement de l’expérience de Asch.

Tout d’abord, dans le groupe de personnes réunies pour l’expérience, l’un des participants (le sujet) n’est pas au courant que les autres membres du groupe sont en réalité des complices de l’expérimentateur.

On présente aux participants une tâche relativement simple, comme comparer la longueur de différentes lignes tracées sur des cartes. La réponse correcte est évidente, comme vous pouvez le voir sur cette image : les longueurs des lignes sont effectivement très différentes.

Les lignes de l'expérience de Asch
Source : Wikipedia

L’expérimentateur demande tour à tour aux participants de donner leur réponse à voix haute après avoir observé les cartes. Cependant, les complices de l’expérimentateur (qui sont en réalité les autres “participants”) donnent des réponses incorrectes de manière délibérée et coordonnée.

Le vrai participant (le sujet), souvent le dernier à répondre, est confronté à la contradiction entre sa réponse évidente et les réponses erronées fournies par les autres membres du groupe. Cela crée une pression sociale pour se conformer à la majorité, même si le participant sait que les réponses des autres participants sont incorrectes.

L’expérimentateur observe et enregistre les réponses du sujet pour chaque essai.

Les résultats de l’expérience de Asch ont montré que de nombreux sujets se sont conformés à la réponse majoritaire, même si celle-ci était clairement fausse. En moyenne, environ un tiers d’entre eux se sont conformés à la réponse erronée dans la majorité des essais, tandis que les deux autres tiers sont restés indépendants en donnant la réponse correcte. Ce phénomène de conformisme a été observé dans diverses cultures et contextes sociaux.

L’expérience de Asch est bien entendu fondamentale car elle met en évidence la force de la pression sociale et la tendance des individus à se conformer à la majorité, même si cela contredit leur propre jugement. Elle souligne l’importance de la pensée critique et de l’indépendance dans la prise de décisions, en particulier lorsque les opinions et les actions collectives peuvent influencer de manière significative les comportements individuels.

 

Les raisons expliquant le biais de conformisme

Les raisons qui sous-tendent le biais de conformisme sont évidemment multiples, notamment :

  • Besoin d’acceptation sociale : Les individus ont souvent un désir naturel d’appartenir à un groupe et de se sentir acceptés par leurs pairs. Pour éviter le rejet ou l’isolement social, ils peuvent adopter des comportements ou des opinions en accord avec la majorité.
  • Incertitude et ambigüité : Face à des situations nouvelles ou ambiguës, nous pouvons être enclins à suivre les autres pour trouver des repères ou des solutions appropriées, car cela nous semble plus sûr que de prendre des décisions individuelles risquées.
  • Influence de l’autorité : Lorsqu’une figure d’autorité exprime des opinions ou des directives, les individus peuvent être enclins à les suivre, même si cela contredit leur jugement personnel.
  • Normes sociales : Les normes culturelles et sociales peuvent exercer une forte pression pour se conformer à certains comportements ou croyances, et les individus peuvent s’y soumettre inconsciemment.
  • Peur de l’isolement : de crainte de nous retrouver seul(e) dans nos opinions peut nous amener à adopter les idées les plus communément admises même si elles ne correspondent pas à nos convictions profondes.

Des conséquences positives … et négatives

On oublie parfois que les biais cognitifs peuvent entraîner des conséquences positives. D’ailleurs, si notre cerveau nous joue des tours, c’est bien souvent pour nous protéger.

Le biais de conformisme en effet s’avérer favorable dans certaines situations, comme le respect des lois et des règles de la société.

En revanche, il peut aussi être préjudiciable en limitant la diversité des idées et en étouffant l’expression de pensées originales et créatives. Dans des contextes de prise de décisions collectives, il peut conduire à des phénomènes de pensée de groupe où les membres évitent les conflits et convergent vers une idée commune sans remettre en question les alternatives.

 

Alors, si vous êtes amené(e) à animer des ateliers de travail de groupes, le premier conseil pour ne pas tomber dans le piège est la prise de conscience de l’existence du biais de conformisme.

Ainsi informé, vous serez plus à même d’encourager la diversité des opinions et des idées dans les groupes, en particulier lors d’activités de brainstorming, de prise de décisions et de résolution de problèmes. Cette démarche visant à promouvoir l’expression individuelle et la réflexion critique vous permettra ainsi de mieux évaluer les options et d’obtenir des résultats plus créatifs et équilibrés.

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Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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