Comment communiquer avec des gens que nous ne supportons pas

Il peut être difficile de travailler avec des collègues que nous ne supportons. Conflits personnels en raison de différences de personnalité, de valeurs, de styles de travail ou de points de vue, mais également problèmes de communication, ambiance de travail dégradée, impact sur notre bien-être, diminution de la productivité et difficultés à collaborer… La liste des effets négatifs est longue, et il paraît donc nécessaire de savoir gérer efficacement ces interactions compliquées avec ces managers, collègues et contributeurs que nous ne supportons pas.

Dans cet article, je vous propose de développer vos compétences relationnelles et comportementales grâce au Dr Rick Brinkman, co-auteur avec le Dr Rick Kirschner de l’ouvrage intitulé « Dealing With People You Can’t Stand : How To Bring Out The Best Of People At Their Worst ».

En tant que Business Analysts, notre capacité à mettre en place un climat propice à la collaboration est cruciale. Sans cela, nous passons à côté d’informations précieuses pour identifier les problématiques d’entreprise à résoudre, concevoir les solutions les plus pertinentes pour y remédier et la conduite du changement n’en finit plus de nous donner des maux de tête.

Notre métier de Business Analyst nous amène en effet régulièrement à rencontrer, collaborer ou faire collaborer entre elles des « personnalités incompatibles ».

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Communiquer avec ces inconnus connus

La première prise de recul à avoir vis-à-vis de ce contexte émotionnellement exigeant pour nous autres, Business Analysts empathiques, est de prendre conscience que nous ne connaissons ces personnes agressives, plaintives, négatives, ou autres ‘Mr/Mme Je sais tout’ que dans un cadre très limité. Ces personnes ne sont pas forcément comme cela dans leur vie de tous les jours, avec leur conjoint ou leurs enfants.

Ce manager qui a la science infuse et n’écoute pas nos propositions d’amélioration est peut-être extrêmement passif dès qu’il rentre chez lui.

Cette contributrice métier pessimiste se transforme peut-être en personne lumineuse et joyeuse dès qu’elle rejoint l’association qu’elle soutient depuis des années.

Le collègue grincheux qui trouve toujours à redire de la moindre proposition d’évolution devient probablement soudainement ingénieux et créatif lorsque qu’il doit innover pour aménager sa maison ou son jardin.

Comme le souligne le Dr Rick Brinkman:

« La communication est comme un numéro de téléphone, vous avez besoin de tous les chiffres pour passer l’appel et vous avez besoin qu’ils soient dans le bon ordre .

Si vous composez l’indicatif de votre pays à la fin du numéro, l’appel n’aboutira pas. Tous les chiffres sont importants. Dans un numéro à 10 chiffres, si vous transformez le six en neuf, ce n’est qu’une erreur de 10 %, mais l’appel n’aboutira pas. »

La communication est tout aussi spécifique. Si l’on prend l’exemple de votre patron “Mr je sais tout”, il y a un chiffre, une stratégie que vous pouvez mettre en œuvre pour qu’il cesse d’être un “Mr je sais tout” et qu’il fasse preuve de plus d’ouverture d’esprit. Mais il y a également des comportements à éviter car ceux-ci exacerberont cette fâcheuse tendance…

L’enfer est pavé de bonnes intentions

Les auteurs du livre « Dealing With People You Can’t Stand : How To Bring Out The Best Of People At Their Worst » soulignent également que « l’enfer est pavé de bonnes intentions ».

Prenez par exemple quelqu’un d’agressif, qui médit sur ses collègues dans leur dos, et qui a une tendance à chercher à les dominer et à les abuser. Cette personne est en réalité dans un mode actif pour faire bouger les choses – et en soi, il n’y a rien de mal à vouloir faire évoluer une situation insatisfaisante.

Le problème surgit quand cette personne va trop loin, attaquant ou « écrasant » ses collègues. Cette « zone de danger », comme l’appellent Dr Rick Brinkman et Dr Rick Kirschner, prend sa source dans le désir de bien faire les choses, soutenu par un niveau élevé de perfection.

Ainsi, constatant que la situation ou les résultats ne sont pas à la hauteur de son idéal, et se sentant impuissante, cette personne sent monter une tension intérieure. Elle peut se plaindre, critiquer, voire se montrer ouvertement agressive, et généraliser en disant que « rien » ne va, ou que c’est « toujours » comme ça. Or les généralisations sont contre-productives, car c’est au travers de l’identification des exceptions ou des spécificités d’une situation que l’on peut tirer la pelote de laine et résoudre les problèmes. Ces personnes s’enferment donc toutes seules dans une attitude et un monde où les solutions n’existent pas.

A contrario, il existe des collègues toujours gentils et agréables, mais dont on ne sait jamais si on peut compter sur eux. Rappelez-vous de ce collègue à qui vous demandez s’il peut faire telle ou telle tâche pour jeudi.

Il vous répond “bien sûr”.

Vous insistez : « Êtes-vous sûr de pouvoir le faire pour jeudi ? »

« Oui, pas de problème ».

Puis le jeudi arrive et la tâche en question n’est pas faite.

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Alors bien sûr, il n’y a rien de mal à essayer de plaire aux gens, mais quand cela conduit à dire oui à tout et à tout-le-monde, en prenant des engagements qu’on sait ne pas pouvoir tenir, cela génère là aussi la création d’une « zone de danger ».

Toutes ces personnes partent donc initialement d’une bonne intention, mais ce faisant, ils vont dans des extrêmes et créent des problèmes pour elles-mêmes et pour les autres.

De la zone de danger à la zone de coopération

Ainsi, lorsque vous êtes irrité(e) par l’attitude de l’un de vos collaborateurs, collègues ou interlocuteurs, rappelez-vous que son intention initiale est sans doute bonne.

Cette attitude vous permettra de sortir de la « zone de danger » pour vous ramener vers la « zone de coopération », comme l’appellent les deux co-auteurs.

Dans la zone de coopération, les intentions de chaque partie prenante peuvent être différentes : l’une veut juste exécuter ses tâches, tandis que l’autre veut faire ce qu’il faut, que la troisième souhaite trouver un accord, et que la quatrième cherche à se faire apprécier.

Lorsqu’elles n’obtiennent pas ce dont elles ont besoin de la part des autres protagonistes et que leur stress augmente, ces personnes entrent dans cette fameuse zone de danger et c’est à ce moment-là qu’apparaissent des comportements archétypaux scrutés et détaillés par R. Brinkman et R. Kirschner dans leur livre.

Effacer les différences pour communiquer

L’une des astuces proposée par les deux co-auteurs est de pratiquer ce qu’ils appellent « blending and redirecting », littéralement « mélanger et rediriger ».

Imaginez par exemple que vous voyagiez en train et que vous entamiez une discussion avec votre voisin. Vous découvrez alors que vous avez grandi dans la même ville, et à ce moment précis, les différences et la distance entre vous s’estompent.

Maintenant, imaginez que vous deviez parler à un enfant de 5 ans : vous vous accroupissez pour vous mettre à son niveau et ainsi, vous réduisez les différences physiques. 

Ou encore, vous vous rendez à un match de foot avec des amis et portez tous les t-shirts de votre équipe favorite.

C’est cela, le « mélange », c’est se fondre dans la masse.

Lorsque vous allez au restaurant et que vous demandez à votre ami : “Qu’est-ce que tu vas prendre ?”, l’important pour vous est en réalité de partager des émotions, de vous relier, de vous « mélanger ».

Alors, pour réussir à communiquer avec des gens avec lesquels vous ressentez des différences parfois rédhibitoires, pensez à aller à leur rencontre là où ils sont.

Prenons l’exemple de votre manager qui ne sait pas déléguer car il trouve que cela ne va pas assez vite et qui agit comme un rouleau compresseur : sachez aller droit au but avec lui et être direct, car cela lui convient parfaitement.

En revanche, pour gérer votre gentil collègue si amical mais dont on ne sait jamais de quel avis il est car il dit oui à tout et tout-le-monde, évitez d’être trop direct. Au lieu de lui demander de rendre une tâche pour jeudi, vous pouvez lui dire « Si vous avez trop de choses à faire en ce moment et si vous ne pensez pas pouvoir le faire pour jeudi, ce n’est pas grave ».

Bien sûr, ce gentil collaborateur va certainement répondre « Oh non, c’est bon pour jeudi »…

Et vous, sachant ses bonnes intentions et sa peur de déplaire, vous lui répondrez alors « Non non, ne me répondez pas tout de suite. Prenez le temps de vérifier dans votre agenda que c’est possible pour vous, car cela implique aussi un autre département de l’entreprise. Prenez le temps de vérifier avec ce dernier, ce n’est vraiment pas un problème ».

Avec cette personnalité, au contraire, il faut ralentir le rythme, aller la rencontrer là où elle est, dans cette zone où se trouve un accord harmonieux.

Ainsi, se fondre dans la masse, en allant à la rencontre des gens là où ils sont déjà, nous permet de les guider et de les rediriger ailleurs. Finalement, n’est-ce-pas ce que nous faisons spontanément avec les personnes que nous apprécions? Ce n’est effectivement pas, à proprement parler, une technique : c’est juste la meilleure manière de communiquer.

Communiquer en fonction de  l’archétype de votre interlocuteur

Dans leur livre, les Dr Rick Brinkman et Rick Kirschner identifient 13 archétypes de personnalités souvent citées lors de leurs interviews.

Ces archétypes ont toutes des comportements spécifiques. Par exemple, le “Tank” est insistant, agressif, il attaque, il vous fonce dessus. Quand il s’agit d’une relation parentale, il est appelé par les co-auteurs un “Général” parce qu’il prend le contrôle de la famille.

« C’est comme s’il s’agissait de son propre peloton, même s’il n’attaque pas systématiquement. »

Parmi les archétypes, citons également le “Martyr”, « oh pauvre de moi, je fais tout pour tout le monde, pourquoi personne ne pense à moi ? ».

Il y a aussi le “Juge”, le “Critique”, ou encore le “Meddler” qui fourre son nez partout. Celui-ci est un peu “mi-Juge et mi-Tank”, en ce sens qu’il juge que vous ne faites pas ce qu’il faut et ensuite agit comme un Tank, une partie de lui prenant le dessus, se mêlant de tout et agissant à votre place.

Nous sommes nous-mêmes des “personnes difficiles”

Il est également important de prendre conscience que nous sommes nous-mêmes des « personnes difficiles » pour quelqu’un d’autre, à un moment ou à un autre. En réalité, nous n’adoptons pas un seul archétype, nous en endossons des différents selon les situations qui se présentent.

Prendre conscience de cela nous aide à être moins dans la confrontation face à des interlocuteurs que nous jugeons difficiles, parce que nous pouvons envisager qu’à notre image, ils sont peut-être très différents de ce qu’ils montrent au travail lorsqu’ils sont avec leurs proches.

Pour les Dr Rick Brinkman et Rick Kirschner, si vous connaissez la stratégie à adopter face à l’archétype qui vous confronte, vous l’aidez à en sortir.

Or comme la plupart du temps, nous ne savons pas comment faire, tout ce que nous faisons semble pousser la « personne difficile » à s’enfoncer davantage dans son comportement archétypal. Vous essayez de résoudre leur problème ? Ils ne font que continuer à se plaindre ou à se montrer négatifs.

Alors que les pleurnicheries reflètent un sentiment d’impuissance, la négativité démontre d’un sentiment de désespoir.

L’une des pires choses à faire face à quelqu’un de négatif est d’essayer de lui dire que “ce n’est pas si grave”. En effet, lorsque les gens sont négatifs, ils ont une réaction instinctive polarisée, qui les pousse à voir systématiquement le négatif dans le positif.

Les co-auteurs illustrent ce comportement avec l’exemple des enfants de deux ans, qui sont dans leur période du « non ! » : c’est l’heure d’aller au lit ? « Je ne veux pas aller au lit ». Si vous leur dites que vous êtes d’accord, mais qu’ils doivent dans ce cas rester éveillés toute la nuit, ils répondront alors “Et si je suis fatigué ?”.

Ainsi, lorsque vous essayez de dire à une personne négative que la situation n’est pas si grave, vous pouvez vous attendre systématiquement à une réaction inversée face à votre bonne intention de réconfort.

A la place, essayez de répondre avec un brin d’humour : “Tu as raison, c’est sans espoir, je ne sais pas pourquoi nous nous donnons toute cette peine, autant tout arrêter immédiatement car rien ne marchera jamais”.

Vous serez surpris de l’entendre répondre : « Tu as raison, mais en fait, il suffit de fait ceci ou cela pour que ça marche ». Tout d’un coup, cette personne négative vous donnera une solution. Les 2 co-auteurs soulignent avec un peu d’amusement à quel point il est étonnant de constater comme cette stratégie fonctionne bien avec la négativité.

Pour communiquer avec des personnes que vous jugez difficiles ou avec lesquelles vous n’avez aucun atome crochu, voire une réelle aversion, il est donc très important de reconnaître l’origine de leur comportement.

C’est le point de départ pour identifier comment votre propre attitude peut améliorer la situation ou au contraire, faire que celle-ci va se retourner contre vous et s’empirer.

Pour en savoir plus, vous pouvez lire le livre “Dealing with Meetings You Can’t Stand: Meet Less and Do More” des Dr. Brinkman et Kirschner.

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Évaluation de l'article
Alice Svadchii

Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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