Comment identifier les fonctionnalités d’un produit : le diagramme de Kano

Sans clients pour l’utiliser, le meilleur produit au monde disparaîtra. Les enjeux de la satisfaction client sont donc fondamentaux pour les entreprises, et la plupart d’entre elles en a heureusement conscience. Dès lors, comment s’assurer que les fonctions d’un produit ou d’un service répondent bien aux besoins du marché ? L’un des outils privilégiés pour effectuer cette analyse s’appelle : le diagramme de Kano.

Les statistiques démontrent que la première cause d’échec des start-ups est liée à l’inadéquation de leur produit ou de leur service aux besoins du marché (source : CB Insights) : 42% d’entre elles ne passent pas le cap de la première année faute d’avoir mal estimé les attentes de leurs clients potentiels. Cette problématique de décalage entre les caractéristiques de l’offre et les besoins se retrouve à vrai dire partout, du département marketing, en passant par le service commercial ou encore le développement des applications informatiques.

Qu’est-ce que le diagramme de Kano ?

Développé par Noriaki Kano dans les années 1980, le diagramme de Kano permet à une entreprise de classer les caractéristiques de ses produits en fonction de la valeur qu’elles apportent à leurs utilisateurs.

En outre, il permet aux équipes de développement de se concentrer sur l’optimisation des caractéristiques essentielles d’un produit donné, évitant ainsi de gaspiller du temps, de l’argent et de l’énergie à créer ou maintenir les fonctionnalités inutiles ou superflues.

Voici à quoi il ressemble – et voyons ensuite comment le lire et l’utiliser avec succès.

Modèle de Kano

Les Cinq Catégories du diagramme de Kano

Retenez tout d’abord que chacune des caractéristiques d’un produit ou d’un service peut être classée en fonction de la présence ou de l’absence d’une fonctionnalité, ainsi que du niveau de satisfaction de l’utilisateur lié à la présence ou à l’absence de cette même fonctionnalité.

Une caractéristique pourra ainsi être classée dans l’une des catégories suivantes :

  • Les attentes de base : généralement non exprimées, elles sont néanmoins indispensables aux yeux des clients, et doivent donc être impérativement satisfaites.
  • Les attentes de performance : la satisfaction augmente proportionnellement au niveau de performance délivré par la fonction.
  • Les attentes attractives : le produit ou service surprend son utilisateur avec une fonction à valeur ajoutée qu’il n’attendait pas. Ces fonctions vont au-delà des attentes client – et c’est souvent dans cette catégorie qu’on trouve les innovations.
  • Les caractéristiques indifférentes : la présence ou l’absence de ces caractéristiques ne modifie pas le niveau de satisfaction client.
  • Les caractéristiques inversées : leur présence nuisent au bon fonctionnement du produit ou du service.

1ère catégorie : les attentes de base

KANO attentes de base

Il s’agit par exemple d’un volant dans une voiture (du moins, celles sans Autopilot 😊), ou encore la possibilité de passer des appels téléphoniques sur un nouveau Smartphone.

Ici, cela semble assez évident, car je prends des exemples de la vie courante, auxquels tout le monde peut s’identifier. Mais sachez que ça n’est pas le cas pour de nombreux produits et services répondant à des besoins métiers spécifiques. Les identifier nécessite une collecte rigoureuse et exhaustive d’informations auprès des contributeurs concernés par le produit que vous développez.

Ces fonctionnalités indispensables doivent être présentes, sinon le produit ne fonctionnera pas – et n’aura aucune valeur aux yeux du client.

De l’autre côté de la courbe, l’absence de cette caractéristique de base se traduira par la perception d’un mauvais fonctionnement du produit ou du service, ce qui entraînera une faible satisfaction de la clientèle.

Cependant, bien que la présence des fonctionnalités indispensables ait un effet positif sur la caractéristique du produit, cela ne conduit pas à générer un effet positif sur la satisfaction client.

Laissez-moi vous expliquer cela :

  • Si vous achetiez une voiture sans volant, ou un smartphone qui ne peut pas passer d’appels téléphoniques, comment vous sentiriez-vous ? Sans doute plutôt fâché.
  • Et à votre avis, comment vous sentiriez-vous si vous achetiez une voiture avec un volant, ou un smartphone qui peut passer des appels téléphoniques ? Vous ne seriez probablement pas si emballé que ça par le produit en question, n’est-ce-pas ?

Retenez donc ceci : la présence d’une fonction indispensable n’accroît pas le niveau de satisfaction mais son absence est totalement destructrice sur l’expérience utilisateur.

2ème catégorie : les attentes de performance

Maintenant que nous avons une meilleure compréhension du diagramme de Kano, voyons comment les caractéristiques liées aux attentes de performance y apparaissent :

KANO attentes de performance

Comme le montre le diagramme, le niveau de satisfaction d’une telle caractéristique est en corrélation directe avec la présence ou l’absence de la fonctionnalité liée.

Par exemple : la mémoire d’un smartphone, ou encore la vitesse de traitement d’un ordinateur.

Dans ce cas, le niveau de satisfaction se mesure en général à ce constat : « plus il y en a, mieux c’est ».

Sur un projet informatique, il faudra donc définir la “quantité” d’une fonctionnalité, ou encore sa performance. C’est ce que nous, Business Analysts, décrivons dans le paragraphe « Exigences Non Fonctionnelles » des Spécifications Fonctionnelles Détaillées.

Voir aussiComment décrire les exigences non fonctionnelles?

3ème catégorie : les caractéristiques attractives

Dans le diagramme de Kano, voici comment apparaissent les caractéristiques attractives :

KANO caractéristiques attractives

En regardant la courbe, on pourrait être tenté de faire un raccourci, et de considérer les caractéristiques attractives comme étant simplement l’inverse de celles satisfaisant les attentes de bases.

En effet, le simple fait d’inclure ces fonctions suffit à améliorer la satisfaction de vos utilisateurs. De plus, l’absence d’une fonction attractive n’affecte pas négativement la satisfaction de ce dernier – puisque, de toute manière, il ne s’attendait pas à trouver cette fonction dans ledit produit ou service.

Par exemple : une voiture indiquant la consommation de carburant, un smartphone ayant une capacité de charge sans fil, ou encore la livraison gratuite en 48H d’une plateforme e-commerce.

Aucune des caractéristiques énumérées ci-dessus n’est essentielle à la fonctionnalité de base du produit ou du service en question, mais elles leur ajoutent certainement de la valeur.

Et c’est là que la comparaison inverse avec les caractéristiques indispensables atteint ses limites : en effet, plus une caractéristique attractive est efficace et fonctionnelle, plus elle augmente la satisfaction client – du moins jusqu’à un certain point.

Dans l’exemple de la voiture, l’affichage de la consommation de carburant est certainement une bonne chose. Si le compteur affiche une précision au dixième de litre (par exemple, 5,2 litres aux 100 km), c’est encore mieux. Cependant, la majorité d’entre nous trouverait totalement inutile de savoir que la consommation de carburant de la voiture est de l’ordre de 5,20814 litres /100 km.

D’autre part, bien qu’il soit certainement intéressant pour une entreprise d’inclure des caractéristiques attractives dans ses produits ou services, elles doivent prendre garde à ne pas le faire au détriment des caractéristiques de base ou de performance.

En d’autres termes, quand vous analysez le diagramme de Kano, et que vous en tirez la conclusion qu’il faut favoriser les caractéristiques attractives, demandez-vous si vous n’êtes pas en train de définir les fonctionnalités d’un smartphone avec chargeur sans fil, mais incapable de passer un appel téléphonique ou qui serait doté d’une trop petite mémoire.

Et, non, je n’enfonce pas une porte ouverte 😊… Rappelez-vous que lorsque vous travaillez sur des problématiques métiers spécifiques qui ne vous sont pas familières, l’erreur peut être vite faite si vous ne prenez pas de recul en lisant le graphique de Kano.

J’ajouterais aussi une remarque liée aux caractéristiques innovantes, que l’on retrouve souvent dans cette catégorie du diagramme de Kano. En effet, avec l’évolution rapide des progrès technologiques, des fonctions qui étaient autrefois considérées comme “attractives” deviennent la norme – et se retrouvent finalement dans les catégories des fonctions de base ou de performance.

Voir aussiDilemme : êtes-vous plutôt disruptif ou innovateur?

4ème catégorie : les caractéristiques indifférentes

Cette catégorie regroupe les caractéristiques d’un produit ou d’un service dont la présence ou l’absence n’a absolument aucune incidence sur le niveau de satisfaction de l’utilisateur.

KANO caractéristiques indifférentes

Exemples de caractéristiques indifférentes : le type de plastique utilisé dans une bouteille de jus de fruit, le réservoir de carburant d’une voiture situé sur le côté gauche ou droit, ou encore la couleur du capot d’une imprimante jet d’encre.

(Note : ce sont des exemples – il se peut évidemment que le type de plastique utilisé par votre entreprise soit important pour votre clientèle éco-consciente ou pour respecter les contraintes sanitaires en vigueur)

Remarquez que, même si ces caractéristiques peuvent être importantes en interne pour l’entreprise qui fabrique ou fournit le produit / service – par exemple, l’utilisation d’un plastique moins cher -, le diagramme de Kano et l’analyse de l’adéquation des fonctionnalités aux besoins du marché n’y attache aucune valeur.

Quoi qu’il en soit, l’objectif pour vous est d’identifier les caractéristiques de votre produit qui sont indifférentes aux yeux de vos utilisateurs, afin d’éviter d’investir des ressources excessives dans leur modification et/ou leur amélioration.

5ème catégorie : les caractéristiques inversées

Comme vous pouvez le voir ci-dessous, la courbe de ces caractéristiques est inversée par rapport à celle des attentes de performance :

KANO caractéristiques inversées

En d’autres termes, les fonctions inversées sont celles qui nuisent au niveau de satisfaction de l’utilisateur.

Exemples : trop de boutons sur le volant, distrayant ainsi le conducteur ; fonctions logicielles avancées qui sont trop compliquées à utiliser pour l’utilisateur moyen ; un nombre excessif de tables dans un restaurant, générant trop de bruit ou une proximité trop importante entre convives.

En caricaturant un peu, les caractéristiques inversées sont celles qui n’ont pas de justification et qui n’ajoutent aucune valeur au produit ou au service.

Et retenez bien ceci : que vous soyez Business Analyst, chef de projet, analyse marketing ou commercial, le diagramme de Kano est un précieux outil, tant que les conclusions que vous tirez de sa lecture restent focalisées sur la qualité de l’expérience client dans sa globalité.

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Alice Svadchii
Alice Svadchii
Auteure du blog et Business Analyst enthousiaste
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Alice Svadchii

Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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