Guide pratique du recueil des besoins

En Business Analyse, la matière première est l’information, sous toutes ses formes.

Il existe de nombreuses techniques pour recueillir l’information, dont le « fameux » atelier de recueil des besoins. Celui-ci peut se dérouler auprès d’un petit nombre d’individus, voire d’une seule personne, ou d’un groupe plus large, en face à face comme à distance.

Même si le déroulement de la séance peut laisser une certaine part à l’improvisation ou à la discussion libre, il est indispensable de soigneusement la préparer. Le cas échéant, vous risquez de passer à côté d’informations cruciales, ou de recueillir des besoins incomplets voire inappropriés à votre contexte projet.

La business analyse (analyse métier ou analyse d’affaires) est mise en œuvre dès lors qu’une Organisation éprouve la nécessité de s’adapter à un changement anticipé ou existant, qu’il se produise en interne ou en externe.

Dans cette transition d’un état actuel à un état futur, les praticiens de la Business Analyse assistent l’Organisation en identifiant et en analysant la cause racine du problème. Ce diagnostic leur permet ainsi de recommander la meilleure solution possible, puis de la définir très précisément, et d’accompagner sa mise en œuvre auprès des utilisateurs finaux.

Bien que 80% des solutions concernent les systèmes d’information, la Business Analyse n’est pas cantonnée aux seuls projets informatiques. On la retrouve en effet également appliquée aux projets opérationnels métiers et de gouvernance d’entreprise, et les professionnels de tous horizons qui la pratiquent n’ont le plus souvent pas le « titre » de Business Analyst dans leur fiche de poste : consultants de tous poils, managers, experts en X ou Y … Tous pratiquent l’analyse d’affaires – le plus souvent sans le savoir !

 

L’importance du recueil des besoins et la notion d’élicitation

Le procédé alchimique de la Business Analyse se base sur une matière première complexe : l’information.

Celle-ci est le prérequis à toutes les activités de l’analyse métier : analyses, recommandations, spécifications, formations, … vous ne pouvez y échapper.

Le terme d’élicitation a été introduit par l’IIBA, en lieu et place de la simple collecte de l’information. En effet, éliciter n’est pas le simple fait de lister des informations recueillies auprès des contributeurs. C’est d’ailleurs là souvent une erreur que font les Business Analysts débutants.

L’élicitation est l’activité qui permet de recueillir une information exhaustive, fiable, vérifiée et consensuelle auprès des parties prenantes.

De nombreuses techniques existent, certaines étant collaboratives, quand d’autres ne nécessitent pas une interaction physique avec les parties prenantes. Dans la suite de cet article, je vais donc me focaliser sur l’élicitation collaborative.

 

Recueil des besoins: ayez un objectif de séance clair !

Avant de réunir les contributeurs et de mener à bien une séance de recueil des besoins, il est nécessaire de la préparer soigneusement.

Tout d’abord, assurez-vous d’avoir un objectif clair. Celui-ci dépend de la phase du cycle de vie de la solution ou du projet, de la compétence et des connaissances des contributeurs et du business analyst lui-même, ou encore des bonnes pratiques et des procédures internes de l’Organisation cliente.

Chaque cas est différent, mais vous devez impérativement avoir en tête un objectif clair que vous partagerez en début de séance avec les participants.

Avez-vous besoin de comprendre les contraintes réglementaires ou opérationnelles « métier » ? Voulez-vous aboutir à un consensus entre plusieurs départements d’entreprises intéressés par la même solution ? Est-ce que vous voulez stimuler la créativité et l’innovation pour identifier toutes les alternatives possibles en réponse à un problème ? Est-ce que vous avez pour objectif d’identifier les fonctionnalités d’un nouveau logiciel dans un contexte agile ?

Avant de partir bille en tête sur une liste de questions à poser, assurez-vous donc que votre objectif est clair, sinon vous risquez :

  • De sélectionner les « mauvais » contributeurs,
  • De ne pas savoir gérer votre temps durant la séance,
  • De passer à côté de plein d’informations ou besoins non exprimés,
  • En bref : de ne pas recueillir une information exhaustive, fiable, et de qualité.

Identifier les bons contributeurs

Les séances collaboratives impliquent d’interagir avec au minimum un contributeur, au maximum… beaucoup ! Certaines techniques d’élicitation s’appuient sur des bonnes pratiques : par exemple, en Design Thinking, il est recommandé d’avoir des groupes de 8 à 20 personnes, pour que le processus de créativité se fasse dans les meilleures conditions.

L’identification des bons participants est une première étape majeure de la stratégie d’engagement des contributeurs. Ne vous contentez donc pas d’une liste de noms qui vous aura transmise sans réflexion approfondie préalable. Réfléchissez aux compétences et connaissances que vous souhaitez convoquer, et analysez les différentes contraintes qui entourent le recueil des besoins :

  • Géographiques et logistiques : où sont les contributeurs ? Quelles sont les salles de réunion disponibles ?
  • Linguistiques: parlent-ils la même langue, et si la séance doit se faire dans une autre langue (anglais, en général), sont-ils à même de comprendre et de s’exprimer aisément ?
  • En termes de disponibilité: en fonction de leur charge opérationnelle ou encore de leurs dates de congés / de jours de télétravail, tous les contributeurs ne sont pas logés à la même enseigne.
  • Hiérarchiques: il arrive souvent que l’intervention d’un contributeur, s’il n’est pas rattaché au projet, nécessite une validation de son supérieur hiérarchique. Parfois, une ligne budgétaire est également de mise, pour affecter le temps passé par ce dernier aux coûts du projet.
  • En matière de confidentialité: les contributeurs internes (manager, technicien opérationnel…), et externes (client, fournisseur, administration publique…) peuvent-ils être sollicités en même temps sans risque de divulguer des informations confidentielles?
  • Humaines: certaines personnes sont connues comme étant « difficiles ». Elles peuvent être très expertes, mais se révéler être des éléments perturbateurs lors des séances collectives. Dans certains cas, mieux vaut les voir seul.e à seul.e qu’en groupe, ou se préparer à gérer leurs interventions « piquantes » lors de l’atelier. Dans d’autres situations, ces contributeurs « difficiles » permettent à leur insu d’identifier les cas aux limites et les exceptions car ils auront à cœur de démontrer la faillibilité de la solution. Ce sont les objectifs de la séance que vous aurez préalablement fixés qui vous aideront à identifier leur niveau d’engagement.

 

Le recueil des besoins grâce à la “bonne” technique d’élicitation

De nombreuses techniques d’élicitation existent, chacune ayant ses avantages et ses inconvénients. Certaines sont collaboratives, d’autres peuvent être réalisées seul.e face à son écran ou à de la documentation. Certaines techniques sont dédiées à l’innovation, d’autres à la validation, à la prise de décision, à l’émergence de consensus, au recueil de données numériques, à l’identification de règles métier, ou autres contraintes internes et externes.

Les techniques d’élicitation se combinent entre elles, en fonction du contexte spécifique dans lequel le Business Analyst intervient.

Avant de sélectionner une technique d’élicitation, il est donc nécessaire de savoir ce que l’on cherche, pourquoi, auprès de qui, et quelles sont les contraintes (géographiques, linguistiques, technologiques, humaines, temporelles etc) à prendre en compte pour une efficacité maximale.

Allez-vous utiliser la technique de l’interview en face-à-face, l’observation du poste de travail, le « workshop », le brainstorming, le Design Thinking, les jeux collaboratifs ? Quel(s) outil(s) souhaitez-vous manier en séance : le futur idéal, la tour de guet, l’inversion, le SPIDER ©… ?  

Chaque technique d’élicitation a ses avantages et ses inconvénients. Ce sont les étapes précédentes qui vous aideront à identifier la plus pertinente.

 

Préparer ou improviser le recueil des besoins ?

L’élicitation peut s’improviser pour des questions ponctuelles – par exemple vous relisez vos notes et vous ne comprenez pas tout, ou alors il vous semble qu’il y a des trous dans la raquette : un simple coup de téléphone peut suffire.

Un bon Business Analyst est également empathique et à l’écoute de ses contributeurs. Combien de fois n’ai-je recueilli des informations de valeur au moment de la pause de midi ou à la machine à café ! Bien entendu, charge à vous de savoir garantir la confidentialité à ces personnes qui vous font confiance, et qui attendent de vous une compréhension de leurs problématiques quotidiennes. Ces dernières peuvent être professionnelles mais également personnelles, collectives ou individuelles, et peuvent révéler des besoins cachés inattendus.

Mais d’une manière générale, l’élicitation doit se planifier, car c’est une activité chronophage trop souvent sous-estimée par les chefs de projet.

 

A retenir

L’élicitation est une activité incrémentale et itérative qui permet de recueillir une information exhaustive, fiable, vérifiée et consensuelle auprès des parties prenantes.

Elle peut s’improviser, par exemple pour clarifier ou se remémorer des points de détail simples, ou pour révéler les besoins non exprimés collectifs ou individuels que les contributeurs n’osent exprimer publiquement.

Mais dans l’immense majorité des cas, l’élicitation doit soigneusement se préparer car c’est une activité cruciale pour recueillir l’information contextuelle et les besoins métiers. La phase de préparation passe par l’identification et la communication d’un objectif clair, l’identification et l’engagement des bons contributeurs, et la combinaison des techniques d’élicitation les plus appropriées.

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Alice Svadchii
Alice Svadchii
Auteure du blog et Business Analyst enthousiaste
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Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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