Tutoriel : pratiquer la Business Analyse à distance

Savoir pratiquer la Business Analyse à distance est devenu une nécessité. Depuis de nombreuses années, les réunions virtuelles, en ligne ou même les simples conférences téléphoniques sont couramment utilisées par les organisations. Mais il ne vous a pas échappé qu’avec la crise sanitaire mondiale, cette façon de communiquer s’est non seulement généralisée, mais est, en outre, devenue une obligation.

Quoique nous disposions d’une technologie relativement efficace pour piloter ces sessions à distance, je suis sûre que vous avez tous rencontré au moins une fois dans votre vie professionnelle des difficultés pour mener à bien ces entretiens. Et quand je dis « au moins une fois », je suis sympa…

En effet, outre les problématiques outils d’utilisation de ces technologies de communication en « remote », il existe de nombreux risques supplémentaires à collaborer à distance.

Les risques de la business analyse à distance

Être conscient des risques supplémentaires lié au recueil des exigences à distance est une première étape indispensable pour disposer d’un environnement de communication le plus favorable possible à un recueil des besoins efficace, qui ne repose pas exclusivement sur le bon fonctionnement de la technologie.

Dans cet article, vous découvrirez des trucs et astuces pour mieux gérer cette période de communication si particulière, qui complexifie tant les activités d’élicitation des Business Analysts.

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Risque des réunions en face-à-face
Les risques des réunions en face-à-face (auteur: Mark Monteleon)

Comprendre l’environnement de télétravail de vos contributeurs

Les réunions à distance impliquent au moins deux environnements : le vôtre et celui de vos contributeurs. Examinez d’abord la situation du point de vue de vos parties prenantes. En tant que facilitateurs et business analysts, nous devons nous mettre à leur place pour comprendre leur environnement durant l’appel téléphonique ou la visio-conférence.

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Celui-ci est-il confortable pour eux ? Disposent-ils du bon équipement ? Est-ce qu’il permet aux parties prenantes de se concentrer sur le sujet en question ou subissent-elles des distractions qui perturbent leur concentration ?

Certains contributeurs, par exemple, exécutent de multiples autres tâches en parallèle, comme lire ou répondre à des courriers électroniques (ce qui est souvent aussi le cas en présentiel… Argh…), s’occuper de leurs enfants ou de leurs animaux de compagnie qui réclament au moins autant que votre réunion leur attention…

Cela peut aussi être une distraction liée à l’usage technologique, comme tenter de comprendre vos modélisations et diagrammes depuis l’écran 5 pouces de leur smartphone.

Bien sûr, un autre moment et un autre lieu permettraient d’optimiser la séance, mais cela n’est pas toujours faisable.

 

Des réunions à distance, mais non sans risques!

Aussi, pour bien préparer votre réunion à distance, n’hésitez pas à planifier une séance de préparation avec les participants avant la réunion, afin de discuter de l’ordre du jour et des mesures d’atténuation des risques liés à leur environnement de télétravail.

Voici les 6 risques principaux auxquels vous pouvez être confronté en tant que Business Analyst, organisateur et facilitateur des réunions à distance:

  • Plus faible capacité d’attention / de concentration des contributeurs
  • Inconfort technologique
  • Participation aveugle (quand les contributeurs ne savent pas qui d’autre participe à la réunion)
  • Augmentation du risque lié à la diversité culturelle des contributeurs
  • Difficultés accrues du suivi post-réunion
Les risques des réunions à distance (auteur : Mark Monteleon)

Gérer la capacité d’attention et de concentration en réunion virtuelle

En raison des distractions potentielles subies par vos contributeurs, ou tout simplement de leur environnement de travail à distance parfois moins favorable que les locaux de leur organisation, ceux-ci ont souvent une capacité d’attention et de concentration plus faible.

Ce risque peut être atténué de la façon suivante :

  • Faites en sorte que la réunion soit courte – tout au plus 1 heure.
  • Raccourcissez l’ordre du jour, si besoin en répartissant les sujets de discussion sur une série de réunions et non pas sur une seule.
  • Concentrez-vous sur le contenu de la réunion (pas de discussions hors agenda).
  • Ouvrez et tenez à jour une liste dédiée aux sujets hors agenda à traiter ultérieurement.
  • Demandez aux participants de s’imprégner des supports de la réunion avant que celle-ci ne commence.
  • Prenez soin de marquer des transitions distinctes à chaque changement de sujet.
  • Limitez les participants à ceux qui sont vraiment essentiels à la bonne tenue de la session.
  • Intégrez des exercices interactifs pour les premières réunions (quiz, sondage…), afin de mobiliser l’engagement de vos contributeurs.
  • Utilisez des questionnements directs, clairs et non ambigus et mettez en lumière la valeur ajoutée que ceux-ci peuvent avoir pour vos contributeurs.
  • Utilisez des supports visuels – modélisations, graphiques etc…. – pour faciliter les discussions entre participants.

Ces mesures pour conserver l’attention et la concentration des participants peuvent également être prises lors des séances en présentiel, mais elles sont moins cruciales car le Business Analyst bénéficie de moyens de communication directs qui n’existent plus à distance.

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Limiter l’inconfort technologique du télétravail

Certains participants ne sont pas aussi bien équipés que d’autres. Les salles de visio des entreprises ont souvent des grands écrans et rétroprojecteurs, et dans le cas de participants à distance, ceux-ci sont en général connectés via leur ordinateur de bureau et passent par des réseaux d’entreprise stables.

Cela n’est pas toujours le cas quand vous travaillez de chez vous, et cela peut grandement perturber vos séances de recueil des besoins.

Voici donc quelques pistes d’atténuation de ce risque lié à l’inconfort technologique de vos contributeurs.

  • Assurez-vous d’être correctement entraîné/formé à l’utilisation de l’audio, de la vidéo, du partage d’écrans et de documents, des outils de messagerie instantanée et autres fonctionnalités de réunion à distance. En fonction de la technique d’élicitation sélectionnée (le brainstorming, par exemple), il sera également nécessaire de vérifier que vos contributeurs sachent eux aussi employer correctement la technologie à distance utilisée.
  • Utilisez en priorité la vidéo pour afficher les supports de présentation, plutôt que de mettre votre trombine en plein écran, et assurez-vous que ceux-ci soient pensés avant tout comme des outils de discussion et d’échange.
  • Faites une répétition avant la réunion, et ayez sous la main un plan de secours en cas de panne des outils de communication ou d’interruption de votre connexion internet (ou de celle des autres participants)
  • Si possible, déléguez à une autre personne la responsabilité du bon fonctionnement technologique; C’est ce qui vous permettra de vous concentrer sur l’agenda et sur l’engagement de tout le groupe.

 

Réunions virtuelles: les mesures d’atténuation du risque de la participation aveugle 

Quand on est invité à une visioconférence, ou à une conférence téléphonique simple, on ne sait pas toujours qui est également présent.

Bien sûr, cela ne s’applique pas aux simples face-à-face ou aux micro-réunions : je parle ici de sessions de travail impliquant au moins 4 ou 5 contributeurs.

Ne pas savoir à qui on parle est un frein sérieux réel au recueil qualitatif et quantitatif des besoins.

Il est donc particulièrement important qu’en tant que facilitateur, le Business Analyst connaisse ce risque et l’atténue au maximum.

Voici comment faire:

  • Communiquer les règles de base de la réunion avant de  la commencer.
  • Demander à tous les participants d’indiquer leur nom lorsqu’ils prennent la parole.
  • A chaque fois que de nouvelles personnes rejoignent la session, les signaler aux autres participants.
  • Dans le cas d’ateliers de travail impliquant plusieurs sites, filiales, ou départements de l’organisation, préparer et afficher le nom de tous les participants et leur rattachement organisationnel.
  • Soyez attentif au ton employé par vos participants: cela vous permettra de capter une partie de la communication non verbale et non visible.
  • Soignez votre expression orale : souriez, accentuez vos propos, variez le ton pour que votre assistance reste engagée.
  • Faîtes fréquemment intervenir vos participants.
  • Utilisez un processus de décision distinct de celui utilisé pour la présentation et la discussion, utilisez par exemple la technique des sondages pour valider l’adhésion de vos contributeurs.

 

Réunions virtuelles: atténuer les risques liés aux différences culturelles

Si vous avez l’habitude d’animer des réunions avec des participants de différents pays, vous connaissez sans doute déjà ce risque lié à la gestion de la diversité culturelle.

Voici comment limiter ce type de contraintes.

L’heure

Selon les cultures, certains considèrent les horaires de la séance comme étant un engagement ferme – par exemple, les États-Unis, le Japon.

D’autres, en revanche, les voient comme un objectif à mettre en balance avec d’autres préoccupations et intérêts (les vacances, les coutumes locales), comme par exemple certains pays européens, d’Amérique du Sud, ou du Moyen-Orient.

Certains participants sont culturellement « multitâches » ou « multi-réunions en parallèle » (comme en France), tandis que d’autres travaillent en série (l’Allemagne)

Le respect contractuel

Selon leur culture, certains de vos contributeurs appliquent à la lettre les contrats et les lois (aux États-Unis par exemple), quand d’autres privilégient l’esprit du contrat, s’attachant donc avant tout aux lois locales et culturelles, comme en Chine.

L’autorité – la prise de décision

Certains de vos participants ont l’habitude d’un pouvoir centralisé, comme c’est le cas aux Etats-Unis ou en France. D’autres sont culturellement attachés à une prise de décision en petit groupe (au Japon), et enfin, d’autres préfèrent impliquer tous les acteurs concernés dans le processus, comme c’est le cas en Suède.

Donc, si votre réunion à distance implique une prise de décision, n’oubliez pas de tenir compte de ces différences culturelles.

Les relations humaines

Un autre facteur de diversité culturelle a trait aux relations tissées entre les parties prenantes. Certaines d’entre elles, pour des raisons culturelles, sont très attachées au respect de leurs engagements écrits, ou oraux.

Certains de vos contributeurs seront en revanche davantage tenus et motivés par la confiance et la qualité de la relation humaine.

Pour ceux-là, il est important de savoir avec qui ils traitent, donc ne négligez pas la présentation réciproque et le « trombinoscope » si vous voulez obtenir leur implication pleine et entière.

Les différences d’expression orale

Nous sommes tous différents. Certains participants parlent rapidement, d’autres lentement et pèsent leurs mots, certains font des pauses dans leurs explications que d’autres peuvent interpréter à tort comme la fin de la prise de parole.

Ou encore, certains participants parlent « en acronymes » quand d’autres préfèrent utiliser un langage courant pour mieux se faire comprendre.

Cette attitude peut être aussi bien culturelle que personnelle.

Votre rôle de Business Analyst est de repérer ces différences d’expression pour faire en sorte que toutes les parties prenantes se comprennent.

Sinon vous risquez de les « perdre » en cours de réunion, ce qui est beaucoup moins détectable à distance qu’en face-à-face.

Les accents locaux

Personnellement, la première fois que j’ai animé des ateliers avec des contributeurs indiens, j’ai « buggé ». Non pas à cause de leur manque de vocabulaire – ils parlent parfaitement l’anglais – mais en raison de leur accent à couper au couteau (du moins, à mon oreille de Française). L’accent allemand nécessitait de s’accrocher un peu, mais c’était acceptable, et selon les Etats, certains participants américains étaient très facilement compréhensibles quand d’autres l’étaient beaucoup moins (voire pas du tout).

Je n’ose imaginer comment eux-mêmes arrivaient à me comprendre avec mon propre accent français….

Il est beaucoup plus simple de se comprendre à l’écrit qu’à l’oral. Aussi, pour atténuer les risques d’incompréhension lors de vos réunions à distance entre participants de langues différentes, essayez de privilégier les communications écrites comme le tchat ou le partage d’écrans pour montrer des supports visuels explicatifs etc.

 

Réunions virtuelles: les mesures d’atténuation des risques liés au suivi à distance

Une visio ou téléconférence a un avant et un après. En d’autres termes, elle se prépare, se déroule, et bénéficie d’actions de suivi après avoir eu lieu.

Quand les séances se déroulent à distance, il est important, pour sécuriser la réussite des résultats, d’atténuer les risques liés au suivi post-réunion.

Voici comment faire.

  • Publier sur l’internet / l’intranet les éléments suivants : horaires de la réunion, nom des participants, ordre du jour, supports / documentation, répertoires partagés pour la communication, liste des actions et problèmes à résoudre, registre des risques (concernant le contenu des réunions), hypothèses prises en compte etc.
  • Suivre les résultats grâce à la gestion par objectif (MBO)
  • Pour l’amélioration continue et l’analyse qualitative de vos résultats, fournir et demander à vos parties prenantes un retour d’information :
    • Concernant l’interaction des participants
    • Sur le rythme, le contenu, le processus, le temps et l’objectif de la réunion
  • Encourager les communications par courrier électronique ou par messages instantanés, plutôt que par vidéo ou téléphone, pour tracer les outputs et ainsi les utiliser et les diffuser plus facilement.
  • Expliquer les objectifs du problème à résoudre et les méthodes de priorisation des décisions.
  • Partager les avancées liées à la problématique / au projet discuté.
  • La confiance se construit grâce à la fiabilité du groupe de parties prenantes : il est donc indispensable d’assigner clairement les tâches pour, ensuite, être en mesure de faire un bilan des résultats obtenus.
  • Définir les attentes en matière d’engagement des contributeurs sur le suivi de leurs actions post-réunion.
  • Et enfin, diffuser le compte-rendu de la réunion à tous les participants et aux parties prenantes non présentes, et valider/demander un consensus sur les décisions prises en ou hors séance.

Source: cet article m’a été inspiré par l’excellent texte de Mark Monteleon « Remote Business Analysis: Interviewing and Facilitating »

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Évaluation de l'article
Alice Svadchii

Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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