Doit-on être expert métier quand on est Business Analyst ?

David travaille dans le secteur des assurances depuis 10 ans, et il a contribué à plusieurs projets informatiques en tant que référent métier (Subject Matter Expert). Ses interlocuteurs étaient des Business Analysts, et cela lui a donné envie de se reconvertir à cette fonction, au carrefour des systèmes d’information et du « business ».

Comme ce n’était pas possible en interne, il a postulé auprès d’une entreprise spécialisée dans le médical, mais il s’inquiète… Est-ce possible d’effectuer une reconversion professionnelle de Business Analyst et en même temps, de changer totalement de secteur d’activité ?

 « Récemment, quelqu’un de haut placé dans ma boîte actuelle m’a dit que si je voulais changer de secteur d’activité, il me faudrait recommencer depuis le bas de l’échelle. En gros, je devrai d’abord devenir un expert dans ce nouveau domaine avant de pouvoir prétendre au poste de Business Analyst dans cette même industrie.

Je suis un peu perdu car je pensais que, puisque la tâche principale d’un BA est de comprendre les systèmes, puis de les analyser pour pouvoir communiquer avec différents départements, tout le monde se ficherait que mon expérience passée se soit déroulée dans les assurances et non pas dans l’industrie de la santé. Ce n’est pas parce que vous connaissez parfaitement un secteur d’activité donné que vous serez un bon BA dans ce secteur, non ? Il me semble que la compétence principale est au contraire de savoir comprendre de nouveaux systèmes, et de savoir évaluer leur capacité à « communiquer » avec leur environnement. C’est du moins ce que je pensais jusque-là.

Et qu’en est-il des compétences transférables ? Pensez-vous que mon directeur a raison ? »

– David

Si je regarde mon propre parcours, mon « bagage » généraliste (école de commerce international puis master en informatique) ne m’a pas empêchée de travailler dans des secteurs aussi différents que les pompes-à-vides destinées à l’industrie, l’orthopédie, l’énergie, l’exploitation autoroutière, les croisières, l’affrêtement maritime, ou encore l’aéronautique.

Ai-je donc le sentiment d’avoir été une « mauvaise » Business Analyst, malgré le fait évident que je n’étais experte dans aucun de ces domaines ? La parole est à mes clients – je pense heureusement avoir fait du bon boulot.

Alors, suis-je une exception, un génie qui s’ignore ? Non plus, évidemment. En réalité, je connais beaucoup de Business Analysts qui ont eux aussi travaillé dans des secteurs très divers, et qui sont reconnus comme étant des professionnels de qualité.

Doit-on en conclure que la (mé)connaissance métier n’a aucune incidence sur la qualité du travail de Business Analyst ?

>> Lire aussi : Top 5 des compétences-clé d’un Business Analyst

Je vous propose de donner la parole à d’autres Business Analysts.

Une expertise métier forte obligatoire ?

  • Tom : « En tant que Business Analyst, notre travail consiste effectivement à apporter de la valeur aux parties prenantes en identifiant des solutions et en construisant le changement nécessaire. Nos « soft skills » nous permettent d’intervenir dans la plupart des domaines. Mais si vous vous engagez dans un nouveau secteur d’activité et que l’objectif est par exemple l’amélioration du système existant, ce sera vraiment difficile, et en général, c’est un Business Analyst ayant une expérience métier forte qui décrochera probablement le poste.

Dans notre équipe, un BA diplômé en finance est arrivé dans notre organisation spécialisée dans les assurances. Sa courbe d’apprentissage a été vraiment compliquée, mais il a fini par s’en sortir. Cependant, il s’agissait d’un poste pourvu en interne. Il a donc été engagé dans l’optique de maîtriser l’expertise métier de l’entreprise. A l’opposé, la personne qui m’a remplacé lorsque j’ai quitté mon dernier emploi n’a pas réussi à s’en sortir (apparemment). Lorsque vous avez affaire à des projets aussi complexes que les assurances sur le marché londonien, vous devez absolument comprendre parfaitement le marché pour bien exercer votre job. Et c’est probablement encore plus le cas lorsque vous êtes sous-traitant. »

  • Julie : « En tant que Business Analyst, vous devez vous former au secteur d’activité dans lequel vous travaillez.

Par exemple, en ce qui me concerne je suis fascinée par la blockchain, et j’adorerais travailler dedans, mais je n’ai aucune expérience. Je regarde donc énormément de vidéos sur YouTube, je lis des livres blancs, je suis les flux RSS dédiés à la blockchain ainsi que les posts sur Linkedin, et je pense même que je vais me payer des tickets d’entrée pour assister à des événements dans ce domaine. Ce que j’espère, c’est que mon auto-formation, ajoutée à mon réel intérêt pour la blockchain et mon expérience de Business Analyst m’aideront à effectuer ma transition professionnelle vers ce secteur.

Certaines industries sont assez fermées et c’est difficile d’y rentrer sans les connaître, mais vous pouvez vous créer de multiples opportunités d’apprentissage. »

>> Lire aussi : Quelles certifications pour devenir Business Analyst?

Expertise métier = contributeurs métier

  • Bruce: « Une certaine connaissance du domaine est essentielle pour être un bon Business Analyst, mais vous ne pouvez pas être expert en tout, et surtout, vous ne devriez pas avoir à l’être.

La capacité à apprendre auprès des Subject Matter Experts (SME) et à les écouter d’une oreille critique est plus précieuse que de devenir soi-même un expert. Beaucoup de SME ont une tonne de croyances limitantes, résultant des nombreuses années à travailler pour la même entreprise, à utiliser le même logiciel, ou à avoir les mêmes clients.

>> Lire aussi5 étapes pour identifier les contributeurs d’un projet

Si votre entreprise insiste pour que les Business Analysts soient d’abord des SME, elle est condamnée à n’obtenir que des améliorations incrémentales de ses systèmes et de son organisation, et aura du mal à construire des solutions innovantes.»

>> Lire aussi : Dilemme : êtes-vous plutôt disruptif ou innovateur?

  • Oriane : « La raison pour laquelle une organisation recrute des Business Analysts est qu’ils sont capables de voir la situation sous un autre prisme, sans les biais cognitifs des SME. Ces derniers contribuent à partager leurs connaissances pointues et sont cruciaux dans le processus de construction de la solution cible, mais un Business Analyst est rarement lui-même un SME. »
  • Philippe: « Une vraie analyse métier peut être implémentée dans n’importe quel secteur. Un Business Analyst doit être capable de collecter une information exhaustive, fiable et vérifiée auprès de n’importe quel contributeur, puis de délivrer de la valeur à l’organisation et aux parties prenantes sans être un expert métier.

Être un Subject Matter Expert est un atout, mais en aucun cas le seul moyen de devenir Business Analyst dans un secteur d’activité que vous ne connaissez pas initialement. »

>> Voir aussi : [VIDEO] Les techniques de collecte de l’information (Part 1)

  • Laura : « Je suis passée de Business Analyst (et SME…) dans une organisation à but non lucratif de services aux handicapés à un rôle de BA pour une marque de boissons très connue. J’ai dû chercher sur Google ce que signifiait FMCG en me rendant à mon entretien de recrutement… Le fait de ne pas être expert dans le secteur des produits de grande consommation n’a été en aucun cas un inconvénient.

Votre aptitude à comprendre rapidement les systèmes ainsi que vos compétences de communiquant sont ce qui fait de vous un Business Analyst de valeur. Une compréhension du monde de l’entreprise est également nécessaire, mais cette expérience peut être acquise dans n’importe quelle industrie. Je ne crois vraiment pas qu’il soit nécessaire d’être SME pour devenir Business Analyst. »

Ce que j’en pense

Un bon Business Analyst est doté de fortes compétences inter et intrapersonnelles. Sa capacité à apprendre, à comprendre, à modéliser des informations et des systèmes est primordiale pour analyser, recommander et aider à la mise en place de solutions cibles.

Tout comme un nouveau collaborateur devra passer par une phase de découverte de sa nouvelle entreprise, un Business Analyst devra lui aussi comprendre les contraintes internes et externes en jeu. Plus un BA est expérimenté, plus il est capable d’appréhender rapidement n’importe quel contexte sectoriel.

Néanmoins, maîtriser au préalable le secteur d’activité de l’organisation, c’est accélérer considérablement la phase d’appropriation métier au travers de laquelle chaque Business Analyst passe inévitablement lorsqu’il débute un projet.

D’autre part, certaines organisations ou industries ont comme prérequis de recrutement une connaissance fine du domaine dans lequel elles travaillent, pour des raisons aussi diverses que le manque de disponibilité de leurs SME, un budget ou des délais serrés, un contexte réglementaire ou technologique complexe etc. Mais cela peut être aussi dû à des croyances limitantes du type « Mon organisation est différente / spéciale » ou tout simplement liée à la méconnaissance du métier de Business Analyst.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Est-ce obligatoire de posséder une expertise métier forte pour être un bon Business Analyst ? N’hésitez pas à me laisser vos avis en commentaire 😊 !

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Alice Svadchii
Alice Svadchii
Auteure du blog et Business Analyst enthousiaste
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Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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