Les 6 erreurs classiques en modélisation des processus (et comment les éviter)

Alors tout d’abord, soyons clairs : non, le mot « processus » n’est pas réservé aux managers et aux consultants en entreprise, se gargarisant de concepts et vocabulaire complexes, déconnectés de la réalité du terrain.

Au contraire, un processus est on ne peut plus concret. Enfin, il devrait l’être.

Car, je vous l’accorde : quand la modélisation des processus est mal réalisée, au mieux, personne ne la comprend et donc personne ne l’utilise, au pire, elle est mal interprétée et conduit à prendre des décisions erronées parfois invalidantes.

Je vais donc vous expliquer dans cet article les 6 erreurs classiques qui sont régulièrement commises en modélisation – et vous donner les 6 astuces qui vous permettront de les éviter.

Commençons par le commencement : qu’est-ce qu’un processus ?

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Un processus est un enchaînement d’activités logiques qui apportent de la valeur ajoutée.

Ces activités sont déclenchées par des données d’entrées (qui peuvent elles-mêmes être les résultats de processus), et grâce à l’utilisation de diverses ressources (humaines, matérielles, informatives, réglementaires…), elles génèrent à leur tour des données de sortie.

En début de processus, on trouve le fournisseur, et tout à la fin, on trouve le client.

L’objectif d’un processus est donc de créer de la valeur ajoutée pour répondre au besoin d’un client. Plus le client est satisfait, plus il achète, et plus l’entreprise peut prospérer – ce qui, après tout, se trouve être le but de toute entreprise. Un processus peut bien entendu avoir comme fournisseurs et clients des processus ou entités internes, mais à chaque bout de la chaîne, on trouve une entité extérieure à l’organisation.

Aussi, lorsqu’une organisation a comme objectif d’améliorer ses activités, produits ou services – en conformité avec la norme ISO 9001 ou simplement dans le cadre d’un besoin de changement ou de l’amélioration continue, elle se doit de connaître et de maîtriser ses processus métier.

Plusieurs outils permettent d’atteindre cet objectif ; la cartographie et la modélisation des processus en font partie.

C’est quoi la différence entre cartographie et modélisation des processus ?

La cartographie des processus s’inscrit dans une démarche d’amélioration continue. Elle permet d’analyser le fonctionnement de l’Organisation, de localiser les processus clés, d’identifier leurs interactions, ainsi que les principaux inputs et outputs. Une cartographie précise et à jour permet d’améliorer les flux de matière mais surtout d’information, toujours dans une optique d’amélioration de la performance. La représentation graphique et schématique de l’enchaînement de l’ensemble des processus est ce que l’on nomme habituellement cartographie des processus.

La modélisation des processus métier va plus loin : son objectif ultime est en effet de faciliter le fonctionnement d’un système, grâce à la documentation des activités, l’évaluation de leur performance, le pilotage de l’exécution des tâches ou encore la gestion des risques. D’autre part, la modélisation est un incontournable de tout département SI (Systèmes d’Information) car il permet de faciliter la compréhension d’une organisation pour automatiser plus facilement certains flux.

Pour modéliser, il existe un certain nombre d’outils et de méthodes standardisées, lesquels – étant partagés par les différents acteurs d’un projet (de système d’information, qualité, gouvernance ou métier), permettent à tous de se comprendre sans ambiguïté.

Enfin, ça, c’est la théorie. Car dans la pratique, même en connaissant la syntaxe de la méthode de modélisation à utiliser, il arrive souvent que les diagrammes de modélisation soient difficiles à comprendre.

Ce qui, avouez-le, est un non-sens puisque la modélisation a justement pour but de clarifier et de simplifier la compréhension de flux complexes.

Les 6 causes racines d’une modélisation ratée

Malgré d’importants investissements en temps et en énergie, et des efforts réellement bien intentionnés de la part des contributeurs, de nombreux modèles de processus opérationnels finissent à la poubelle, faute de ne pas répondre aux besoins.

Peu reflètent vraiment fidèlement l’activité de l’entreprise, ou – dans le cas d’un ré engineering de processus par exemple – ne remportent pas suffisamment l’adhésion des parties prenantes clés, freinant voire empêchant la prise de décision. Il peut aussi arriver que les processus ainsi pondus ne décrivent pas certaines informations, que leurs lecteurs pleins d’espoir venaient pourtant y chercher. Quand, en plus, le choix syntaxique ou graphique du modèle de processus s’avère trop complexe ou incohérent, c’est foutu, le processus finit sa vie seul et abandonné de tous…

Eh bien, sachez que les analystes qui préparent et rédigent ces modélisations de processus « ratées » commettent tous au moins l’une des 6 erreurs suivantes :

  1. Ils n’ont pas défini clairement la méthodologie de modélisation qu’ils allaient utiliser.
  2. Ils n’ont pas une idée précise de l’objectif à atteindre au travers de leur modélisation.
  3. Ils n’ont pas posé les bonnes questions.
  4. Ils n’ont pas défini suffisamment précisément le processus et l’activité, objets de la modélisation.
  5. Il y a eu une insuffisante participation / mobilisation des contributeurs métier.
  6. La modélisation des processus n’a pas été suffisamment vérifiée avant sa validation.

Les 6 habitudes à prendre pour éviter de commettre ces erreurs

Voici les 6 habitudes à adopter pour éviter la plupart des erreurs courantes en modélisation des processus.

  1. Définissez clairement la méthodologie que vous allez employer.

De nombreuses techniques et méthodes existent sur le marché. Elles sont parfois anciennes et remises au goût du jour ; parfois elles sont créées de toutes pièces ou même plagiées (eh oui) par un cabinet de conseil qui, astucieusement, forme ses propres consultants afin de les diffuser chez ses clients avides de nouveauté ; ou encore sont-elles inventées puis enseignées par des organismes de formation certifiante, dans une volonté se démarquer de leurs concurrents.

Bref, ne soyez pas dogmatique quand vous choisissez une méthodologie, mais commencez quand même par en choisir une.

Personnellement, il m’arrive de m’inspirer de méthodes existantes, et de les adapter au contexte professionnel dans lequel je travaille. En effet, utiliser une syntaxe UML stricto-sensu pour réaliser un diagramme d’activités destiné à un client métier non informaticien n’est pas très pertinent. Votre client risque de ne rien y comprendre. Sachez donc vous adapter à vos interlocuteurs, et aux lecteurs de votre modélisation.

  1. Ayez en tête un objectif clair à atteindre pour chacune de vos modélisations

Comme expliqué en début d’article, une modélisation de processus a en général pour objectif de faire soit de l’amélioration continue, soit d’aider à la mise en place d’un changement (en systèmes d’information, comme dans des domaines métier ou de gouvernance). Votre rôle est donc d’identifier, dès le début du projet, le but à atteindre par la modélisation en question. Est-ce pour servir à l’architecte SI et à l’équipe de développement ? Est-ce pour aider à rationaliser les flux de production ? Est-ce pour clarifier des processus métier complexes et permettre aux nouveaux collaborateurs de comprendre l’activité du service ? Est-ce pour identifier les contraintes pesant sur l’activité et trouver des solutions pour améliorer sa performance ?

La réponse à ces questions vous permettra de choisir avec pertinence la granularité de l’information à décrire (un manager n’a pas besoin de comprendre tous les détails de l’activité de son service, alors que c’est ce que recherche un collaborateur opérationnel en charge d’une des tâches de l’activité). Cela vous permettra également de choisir la bonne technique et de vous assurer que la syntaxe sera compréhensible par les lecteurs.

  1. Prévoyez le type de questions que vous poserez

Poser beaucoup de questions, c’est bien, mais poser des questions pertinentes, c’est mieux. Identifiez quelles questions essentielles vous devez poser, lesquelles amèneront des réponses qui elles-mêmes vous conduiront à affiner votre compréhension et à poser d’autres questions essentielles… à la création de votre modélisation. Ne perdez pas de vue que vos questions ont pour but une modélisation précise, faite pour des personnes en particulier.

Et, si vous le pouvez, communiquez à l’avance à vos contributeurs le type d’information que vous recherchez.

  1. Identifiez et définissez sans ambiguïté tous les processus et activités

Un processus métier peut être décrit à différents niveaux d’abstraction. Vous devez vraiment être capable de faire cet exercice qui consiste à identifier à quelle échelle intervient une tâche d’un processus.

Par exemple, si vous décrivez le processus d’un distributeur à billet à un niveau macroscopique pour un client « métier », vous allez schématiser l’utilisateur qui insère sa carte bancaire, tape son code, renseigne le montant à retirer, récupère sa carte, récupère ses billets puis son reçu. A ce niveau de granularité de description des processus orienté métier, vous n’allez pas décrire comment l’algorithme calcule le nombre de billets de 10, 20, et 50 euros que la machine va distribuer au client.

Cela, vous pourrez le faire, mais au sein d’une autre modélisation, par exemple celle qui accompagnera les spécifications fonctionnelles détaillées dont le développeur aura besoin pour travailler.

En tant que Business Analyst, vous devez être capable d’identifier et de normaliser de la sorte tous les processus et activités de votre périmètre projet, au même niveau d’abstraction et à la même échelle, de manière à ce que la photo globale soit cohérente, complète et compréhensible par vos interlocuteurs.

De plus, vous devez savoir définir en quelques mots ou phrases ce que sont ces processus et quel objectif principal ils servent.

  1. Anticipez l’intervention des parties prenantes

Vous devez identifier les contributeurs dont vous aurez besoin pour éliciter l’information brute, nécessaire à la modélisation, mais également ceux qui vérifieront et valideront le processus. Sachez identifier les SME (Subject Matter Experts), leur périmètre et leur degré de connaissances, afin de les interviewer au mieux et au plus près de l’objectif à atteindre.

Par exemple, si vous avez besoin de modéliser de manière extrêmement fine un processus, il est sans doute préférable de ne pas solliciter un manager qui a une vision plus globale de l’activité.

  1. Préparez la phase de vérification et de validation de votre modélisation

Sachez que certains contributeurs ne sont absolument pas familiers avec ce genre de représentation graphique, et qu’il vaudra parfois mieux s’assurer de la présence d’un collaborateur formé ou qui a déjà vu des modélisations et qui pourra ainsi soit valider lui-même, soit assister un SME et le lui traduire avec son vocabulaire et des exemples de la vraie vie.

Bref, pour être certain que la vérification sera bien faite, ne vous contentez pas de demander une relecture par les SME qui vous ont aidé à collecter l’information. Il y a le fond et la forme, et vos vérificateurs doivent être en capacité de vérifier que le contenu est correctement schématisé. Charge à vous de former vos relecteurs au préalable, en leur donnant les clés et la grille de lecture de la modélisation.

Voilà, normalement vous êtes parés pour réaliser une modélisation de processus claire, non ambigue et utile à vos clients, collègues et collaborateurs. Il ne vous reste plus qu’à apprendre quelques unes des méthodes les plus utilisées et donc partagées par les autres acteurs du projet… N’hésitez donc pas à regarder mes recommandations de lecture sur le sujet ;).

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Alice Svadchii
Alice Svadchii
Auteure du blog et Business Analyst enthousiaste
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Alice Svadchii

Formatrice, coach, conférencière et productrice de contenus enthousiaste !

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